Résidence d'Ibrahima Thiam à la photothèque de l’IFAN à l’Université Cheikh Anta Diop et à celle du musée T. Monod d'art africain
2021
En collaboration avec Giulia Paoletti
Ibrahima Thiam, Série Portrait Vintage, Saint-Louis, 2016
La photothèque de l’IFAN constitue un patrimoine visuel et matériel important (60 000 tirages) de l’Afrique de l’Ouest mais largement méconnu. Elle rassemble une production d'images promouvant une vision scientifique liée à l'action coloniale. Cette photothèque n’a pas connu beaucoup de changements depuis dans son organisation (classement thématique et géographique, mobilier). Elle ressemble à une « capsule temporelle involontaire au sein de laquelle se condenseraient un temps et un regard colonial suspendu ». Il nous a semblé nécessaire d’ouvrir ces images, sans se focaliser sur leur dimension coloniale pour ne pas contester leurs potentialités contemporaines. C’est pourquoi nous avons proposé cette résidence à Ibrahima Thiam. Travaillant principalement avec la photographie, Ibrahima Thiam s’intéresse à la mémoire, à l’archive, à l’oralité africaine et aux histoires imaginaires.
« En 2009, quand j’ai commencé à faire de la photographie, j’ai fait des recherches sur l’histoire de la photographie africaine et j’ai réalisé que les photographies de ma collection faisaient partie de l’histoire de la photographie africaine. J’ai entamé une collecte d’images à partir des archives de ma famille, puis j’ai commencé à chiner d’autres images au gré de mes découvertes. Je développe ma pratique autour de la photographie contemporaine et des archives photographiques. Autodidacte, je continue un travail de collecte entamé depuis mon enfance, ce qui a contribué à forger mon imaginaire tout au long de ma vie ».
En décembre 2020, son exposition à Raw Material, faisant suite à une résidence, s’intitulait Ibrahima Thiam : d’une rive à l’autre. Les imaginaires de l’artiste ont été en partie façonnés par les légendes sur les divinités Lebu et leurs relations à la nature, en l’occurrence les villes côtières telles que Dakar, Rufisque, Saint-Louis et Yoff. L’eau et les rituels y afférents constituent des pratiques sacrées effectuées pour maintenir de bonnes relations avec les esprits protecteurs de ces villes et leurs communautés. Cette série photographique met en présence des imaginaires entre les rives des mondes visibles et invisibles, entre terre et eau. Maam Njaré, une des divinités qu’il convoque, se révèle à nous.
Né en 1976 à Saint-Louis au Sénégal, Ibrahima Thiam a d’abord étudié l’économie. Il s’est tourné vers les arts visuels après un atelier de photographie organisé par le Goethe-Institut durant le Mois de la photographie à Dakar en 2009. Il utilise la photographie comme support narratif et outil de représentation. Il a montré son travail dans de nombreuses expositions collectives locales et internationales.
Giulia Paoletti est professeure adjointe au département d’art de l’Université de Virginie. Spécialiste de l’art africain et de la photographie, ses recherches portent sur l’Afrique de l’Ouest aux XIXe et XXe siècles. Elle travaille sur un livre retraçant les origines et les premiers développements de la photographie au Sénégal, où elle a mené des recherches ces dix dernières années. Ses travaux ont été publiés dans des volumes édités et des revues universitaires : Cahiers d’études africaines, Metropolitan Museum Journal, Art in Translation et African Arts. Elle a reçu des prix/bourses de l’American Council of Learned Societies (ACLS)/Getty, du Arts Council of the African Studies Association (ACASA), du Musée national d’art africain, Smithsonian et du Metropolitan Museum.
Photothèque de l'IFAN